as fait de moi. Tu regretteras peut-être en peu. Mais, non⁠—si tu pouvais regretter quoi que ce fût, tu ne serais plus Simone.

Il y a huit ans, la veille de la guerre, j’étais riche⁠—moins riche que ton Américain, mais assez riche pour te donner l’établissement qu’il te fallait. Tu étais moins exigeante avant la guerre, Simone⁠—qui est-ce qui, pendant mon absence, t’a enseigné le goût du luxe? Charmante discrétion de ma part de ne jamais te le demander! Eh bien, une grande partie de ma fortune se trouvant placée en Russie et en Allemagne, j’en ai perdu plus des trois-quarts. Ce que m’en restait en France a beaucoup diminué en valeur. Il est vrai que j’avais mon traitement de capitaine dans l’armée britannique, mais c’est peu de chose, tu sais. Avant même la fin de la guerre, tu m’avais mangé toutes mes économies. C’était idiot, quoi? Un jeune homme qui a perdu les trois-quarts de ses rentes ne se permet plus une maîtresse et un appartement Avenue Kléber. Ou il congédie madame, ou bien il lui demande quelques sacrifices, je n’ai rien osé demander. Si j’étais venu un jour te dire, ‘Simone, je suis pauvre’⁠—que m’aurais-tu répondu?

Sais-tu ce que j’ai fait? Non⁠—tu n’as jamais pensé à demander d’où venait cet argent. Qu’est-ce que cela pouvait te faire que j’ai tout jeté⁠—fortune, honneur, bonheur⁠—pour te posséder? J’ai joué, désespérément, éperdument⁠—j’ai fait pis: j’ai triché au jeu. Je te vois hausser les épaules⁠—tu ris⁠—tu dis, ‘Tiens, c’est malin, ça!’ Oui, mais cela ne se fait pas. On m’aurait chassé du regiment. Je devenais le dernier des hommes.

D’ailleurs, cela ne pouvait durer. Déjà un soir à Paris on m’a fait une scène désagréable, bien qu’on n’ait rien pu prouver. C’est alors que je me suis fiancé avec cette demoiselle dont je t’ai parlé, la fille du duc anglais. Le beau projet, quoi! Entretenir ma maîtresse avec l’argent de ma femme! Et je l’aurais fait⁠—et je le ferais encore demain, si c’était pour te reposséder.

Mais tu me quittes. Cet Américain est riche⁠—archi-riche. Depuis longtemps tu me répètes que ton appartement est trop petit et que tu t’ennuies à mourir. Cet ‘ami bienveillant’ t’offre les autos, les diamants, les mille-et-une nuits, la lune! Auprès de ces merveilles, évidemment, que valent l’amour et l’honneur?

Enfin, le bon duc est d’une stupidité très commode. Il laisse traîner son révolver dans le tiroir de son bureau. D’ailleurs, il vient de me demander une explication apropos de cette histoire de cartes. Tu vois qu’en tout cas la partie était finie. Pourquoi t’en vouloir? On mettra sans doute mon suicide au compte de cet exposé. Tant mieux, je ne veux pas qu’on affiche mon histoire amoureuse dans les journaux.

Adieu, ma bien-aimée⁠—mon adorée, mon adorée, ma Simone. Sois heureuse avec ton nouvel amant. Ne pense plus à moi. Qu’est-ce tout cela peut bien te faire? Mon Dieu, comme je t’ai aimée⁠—comme je t’aime toujours, malgré moi. Mais c’en est fini. Jamais plus tu ne me perceras le coeur. Oh! J’enrage⁠—je suis fou de douleur! Adieu.

Denis Cathcart.

Translation

Simone⁠—I have just got your letter. What am I to say? It is useless to entreat or reproach you. You would not understand, or even read the letter.

Besides, I always knew you must betray me some day. I have suffered a hell of jealousy for the last eight years. I know perfectly well you never meant to hurt me. It was just your utter lightness and carelessness and your attractive way of being dishonest which was so adorable. I knew everything, and loved you all the same.

Oh, no, my dear, I never had any illusions. You remember our first meeting that night at the Casino. You were seventeen, and heartbreakingly lovely. You came to me the very next day. You told me, very prettily, that you loved me and that I was the first. My poor little girl, that wasn’t true. I expect, when you were alone, you laughed to think I was so easily taken in. But there was nothing to laugh at. From our very first kiss I foresaw this moment.

I’m afraid I’m weak enough, though, to want to tell you just what you have done for me. You may be sorry. But no⁠—if you could regret anything, you wouldn’t be Simone any longer.

Eight years ago, before the war, I was rich⁠—not so rich as your new American, but rich enough to give you what you wanted. You didn’t want quite so much before the war, Simone. Who taught you to be so extravagant while I was away? I think it was very nice of me never to ask you. Well, most of my money was in Russian and German securities, and more than three-quarters of it went west. The remainder in France went down considerably in value. I had my captain’s pay, of course, but that didn’t amount to much. Even before the end of the war you had managed to get through all my savings. Of course, I was a fool. A young man whose income has been reduced by three-quarters can’t afford an expensive mistress and a flat in the Avenue Kléber. He ought either to dismiss the lady or to demand a little self-sacrifice. But I didn’t dare demand anything. Suppose I had come to you one day and said, “Simone, I’ve lost my money”⁠—what would you have said to me?

What do you think I did? I don’t suppose you ever thought about it at all. You didn’t care if I was chucking away my money and my honor and my happiness to keep you. I gambled desperately. I did worse, I cheated at cards. I can see you shrug your shoulders and say, “Good for you!” But it’s a rotten thing to do⁠—a rotter’s game. If anybody had found out they’d have cashiered me.

Besides, it couldn’t go on forever. There was one row in Paris, though they couldn’t prove anything. So then I got engaged to the English girl I told you about⁠—the duke’s daughter. Pretty,

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