Qu'on me jalouse peu ou prou… Mais j'n'en ai pas la moindre trace Le plus humble petit soupcon Au cimetier' du Montparnasse A quatre pas de ma maison Le jour des morts, je cours, je vole Je vais infatigablement De necropole en necropole De pierr' tombale en monument On m'entrevoit sous un' couronne D'immortelles a Champerret Un peu plus tard, c'est a Charonne Qu'on m'apercoit sous un cypres… Mais, seul, un fourbe aura l'audace De dir': 'J'l'ai vu a l'horizon Du cimetier' du Montparnasse A quatre pas de sa maison' Devant l'chateau d'ma grand-tante La marquise de Carabas Ma saint' famille languit d'attente 'Mourra-t-ell', mourra-t-elle pas?' L'un veut son or, l'autre veut ses meubles Qui ses bijoux, qui ses bib'lots Qui ses forets, qui ses immeubles Qui ses tapis, qui ses tableaux… Moi je n'implore qu'une grace C'est qu'ell' pass' la morte-saison Au cimetier' du Montparnasse A quatre pas de ma maison Ainsi chantait, la mort dans l'ame Un jeune homm' de bonne tenue En train de ranimer la flamme Du soldat qui lui etait connu Or, il advint qu'le ciel eut marr' de L'entendre parler d'ses caveaux Et Dieu fit signe a la camarde De l'expedier rue Froidevaux… Mais les croqu'-morts, qui etaient de Chartres Funeste erreur de livraison Mener'nt sa depouille a Montmartre De l'autr' cote de sa maison La ballade des gens qui sont nes quelque part
Paroles et Musique: Georges Brassens 1972
C'est vrai qu'ils sont plaisants tous ces petits villages Tous ces bourgs, ces hameaux, ces lieux-dits, ces cites Avec leurs chateaux forts, leurs eglises, leurs plages Ils n'ont qu'un seul point faible et c'est etre habites Et c'est etre habites par des gens qui regardent Le reste avec mepris du haut de leurs remparts La race des chauvins, des porteurs de cocardes Les imbeciles heureux qui sont nes quelque part Les imbeciles heureux qui sont nes quelque part Maudits soient ces enfants de leur mere patrie Empales une fois pour toutes sur leur clocher Qui vous montrent leurs tours leurs musees leur mairie Vous font voir du pays natal jusqu'a loucher Qu'ils sortent de Paris ou de Rome ou de Sete Ou du diable vauvert ou bien de Zanzibar Ou meme de Montcuq il s'en flattent mazette Les imbeciles heureux qui sont nes quelque part Les imbeciles heureux qui sont nes quelque part Le sable dans lequel douillettes leurs autruches Enfouissent la tete on trouve pas plus fin Quand a l'air qu'ils emploient pour gonfler leurs baudruches Leurs bulles de savon c'est du souffle divin Et petit a petit les voila qui se montent Le cou jusqu'a penser que le crottin fait par Leurs chevaux meme en bois rend jaloux tout le monde Les imbeciles heureux qui sont nes quelque part Les imbeciles heureux qui sont nes quelque part