vitesse de 56 de l’unite absolue : la vitesse de la lumiere. Mais sur Terre il s’etait deja ecoule pres de sept annees dites independantes.

Des filtres superposes aux ecrans pour preserver l’?il humain amortissaient l’intensite des rayons astraux autant que le faisait l’atmosphere terrestre, avec ses couches protectrices d’ozone et de vapeur d’eau. La clarte violette, fantastique, indescriptible des astres aux temperatures excessivement elevees, semblait azuree ou blanche, les etoiles maussades, d’un rose grisatre, devenaient jaune d’or, comme notre Soleil. Et, au contraire, celles qui brillaient d’un eclat rouge vif, prenaient une nuance pourpree, dans laquelle l’observateur terrestre est habitue a voir les etoiles de classe spectrale5 M5. La planete se trouvait bien plus pres de son soleil que la Terre du sien. A mesure qu’on se rapprochait de Zirda, son astre devenait un disque rouge de plus en plus large, qui emettait des masses de radiations thermiques.

Deux mois avant le voyage, la Tantra avait essaye de communiquer avec la station externe de la planete. Il n’y avait la qu’une station sur un petit satellite naturel, sans atmosphere, situe plus pres de Zirda que la Lune de la Terre.

L’astronef continuait ses appels, alors qu’il restait trente millions de kilometres jusqu’ia la planete et que la vitesse formidable de la Tantra avait ete reduite a trois mille kilometres par seconde. C’etait Niza qui etait de service, mais tout l’equipage veillait devant les ecrans du poste central.

Niza lancait les appels en amplifiant la puissance d’emission et projetant les rayons en eventail.

Ils apercurent enfin le point minuscule du satellite. Le vaisseau se mit a decrire une orbite autour de la planete, se rapprochant d’elle peu a peu, en spirale, et reglant sa vitesse sur celle du satellite. Bientot l’astronef et le satellite semblerent relies par un cable invisible et le vaisseau surplomba la petite planete au cours rapide. Les stereotelescopes electroniques du vaisseau fouillaient la surface du globe. Un spectacle inoubliable s’offrit soudain aux yeux de l’equipage.

Un vaste edifice de verre flambait a la lumiere du soleil sanglant. Sous la toiture plate il y avait une sorte de salle de reunions ou se massait, immobile, une foule d’etres qui ne ressemblaient pas aux terriens, mais etaient certainement des hommes. Pour Hiss, l’astronome de l’expedition, reglait d’une main tremblante le foyer de sa lunette. Les rangees d’hommes ne bronchaient toujours pas. L’astronome augmenta le grossissement. On vit alors une estrade bordee d’appareils, une longue table ou un homme se tenait assis, face a l’auditoire, les jambes croisees, les yeux fixes, effrayant ...

— Ils sont morts, congeles ! s’ecria Erg Noor. Le vaisseau restait suspendu au-dessous du satellite de Zirda, et quatorze paires d’yeux contemplaient sans relache la tombe de verre, car c’en etait une. Depuis combien de temps etaient-ils la, ces cadavres ? Il y avait soixante-dix ans que la planete s’etait tue.

En y ajoutant les six annees du trajet des rayons, cela faisait un quarts de siecle ...

Tous les regards s’etaient tournes vers le chef. Erg Noor, la figure pale, scrutait la brume jaunatre de l’atmosphere, a travers laquelle s’ebauchaient vaguement les lignes des montagnes et les reflets des mers, sans que rien ne leur fournit l’explication qu’ils venaient chercher.

— La station a peri et on ne l’a pas refaite en soixante-quinze ans ! Gela prouve qu’il est arrive une catastrophe sur lu planete. Il faut descendre, percer l’atmosphere, atterrir peut-etre. Puisque vous voila tous rassembles, dites-moi votre avis ...

L’astronome Pour Hiss fut le seul a repliquer. C’etait un novice du Cosmos, qui avait remplace juste avant le depart un collegue tombe malade. Niza considerait avec indignation le grand nez crochu et ses vilaines oreilles plantees trop bas.

— S’il est arrive une catastrophe, nous n’avons aucune chance de nous procurer de l’anameson. Le survol de la planete a faible altitude, et a plus forte raison l’atterrissage, diminueraient nos reserves de carburant planetaire6. Et puis, nous ne savons pas ce qui s’est passe. Il peut y avoir des radiations mortelles ...

Les autres membres de l’expedition soutinrent leur chef :

— Notre vaisseau a une cuirasse cosmique qui le protege contre les radiations. Ne sommes-nous pas charges de tirer les choses au clair ? ... Que repondra la Terre au Grand Anneau ? (le n’est pas tout de constater le fait, il faut l’expliquer ; pardonnez-moi ces raisonnements d’ecolier ! disait Erg Noor de sa voix metallique ou sonnait l’ironie. Je ne pense pas que nous puissions manquer a notre devoir ...

— La temperature des couches superieures de l’atmosphere est normale ! s’ecria joyeusement Niza qui avait procede a des mesures hatives.

Erg Noor sourit et commenca la descente avec precaution, spire par spire, ralentissant a mesure qu’on se rapprochait de irda. Elle etait un peu plus petite que la Terre, et pour la survoler a basse altitude on n’avait pas besoin d’aller a tres grande vitesse. Les astronomes et les geologues verifiaient les cartes de la planete d’apres les donnees des instruments d’optique de la Tantra. Les continents presentaient absolument les memes contours, les mers luisaient, paisibles, au soleil rouge. Les chaines de montagnes, comparees aux photographies, n’avaient pas change non plus, mais la planete se taisait.

L’equipage resta trente-cinq heures sans quitter ses postes d’observation, ou il se relayait de temps a autre aux appareils.

La composition de l’atmosphere, le rayonnement cosmique, les emanations du soleil rouge, tout correspondait aux renseignements qu’on avait sur Zirda. Erg Noor ouvrit l’annuaire qui concernait cette planete et relut le tableau de sa stratosphere. L’ionisation etait plus forte que d’habitude. Un soupcon inquiet s’eveilla dans son esprit.

A la sixieme spire de la descente, on vit les contours de grandes villes. Toujours pas de signal aux recepteurs du vaisseau ...

Niza Krit, relevee pour manger un peu, s’assoupit. Elle crut avoir dormi quelques minutes a peine. L’astronef survolait le cote nocturne de Zirda, pas plus vite qu’un simple vis-soptere terrestre. Il devait y aveir la-bas des villes, des usines, des ports. Mais pas une lumiere ne brillait dans cette nuit noire, exploree a l’aide des puissants stereotelescopes. Le grondement de l’atmosphere fendue par le vaisseau aurait du s’entendre a des dizaines de kilometres. Une heure s’ecoula. Pas la moindre lumiere. L’attente devenait intolerable. Noor brancha les sirenes d’avertissement. Un hurlement terrible se repandit au-dessus du gouffre obscur ; les hommes de la Terre esperaient qu’en se confondant avec le tonnerre du vol, il serait entendu par les habitants de Zirda qui gardaient un silence si enigmatique.

Un flot de lumiere violente balaya les tenebres. La Tantra penetrait dans la zone eclairee de la planete. Tout en bas, l’ombre veloutee persistait. Des cliches rapidement agrandis montrerent que c’etait un tapis de fleurs noires qui ressemblaient aux pavots terrestres. Ces champs s’etendaient sur des milliers de kilometres, evincant les forets, les broussailles, les broussailles, les herbes ... Les rues des villes zebraient, telles les cotes d’un squelette geant, ce tapis sombre que des constructions de fer rouillees marquaient de plaies

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