La Chanson de Roland Joseph Bedier

Publication: 1920

Categorie(s): Non-Fiction, Histoire, Fiction, Poesie

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A Propos Bedier:

Historien medieviste francais. Professeur de litterature francaise du Moyen Age, il publie de nombreux textes medievaux en francais moderne, tels que Tristan et Iseut (1900), La Chanson de Roland (1921), les Fabliaux (1893). Il est elu membre de l'Academie francaise en 1920.

Disponible sur Feedbooks Bedier:

Le Roman de Tristan et Yseut (1900)

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I

LE roi Charles, notre empereur, le Grand, sept ans tous pleins est reste dans l'Espagne : jusqu'a la mer il a conquis la terre hautaine. Plus un chateau qui devant lui resiste, plus une muraille a forcer, plus une cite, hormis Saragosse, qui est sur une montagne. Le roi Marsile la tient, qui n'aime pas Dieu. C'est Mahomet qu'il sert, Apollin qu'il prie. Il ne peut pas s'en garder : le malheur l'atteindra.

II

LE roi Marsile est a Saragosse. Il s'en est alle dans un verger, sous l'ombre. Sur un perron de marbre bleu il se couche ; autour de lui, ils sont plus de vingt mille. Il appelle et ses ducs et ses comtes : « Entendez, seigneurs, quel fleau nous opprime. L'empereur Charles de douce France est venu dans ce pays pour nous confondre. Je n'ai point d'armee qui lui donne bataille ; ma gent n'est pas de force a rompre la sienne. Conseillez-moi, vous, mes hommes sages, et gardez-moi et de mort et de honte ! » Il n'est paien qui reponde un seul mot, sinon Blancandrin, du chateau de Val-Fonde.

III

ENTRE les paiens Blancandrin etait sage : par sa vaillance, bon chevalier ; par sa prud'homie, bon conseiller de son seigneur. Il dit au roi : « Ne vous effrayez pas ! Mandez a Charles, a l'orgueilleux, au fier, des paroles de fidele service et de tres grande amitie. Vous lui donnerez des ours et des lions et des chiens, sept cents chameaux et mille autours sortis de mue, quatre cents mulets, d'or et d'argent charges, cinquante chars dont il formera un charroi : il en pourra largement payer ses soudoyers. Mandez-lui qu'en cette terre assez longtemps il guerroya ; qu'en France, a Aix, il devrait bien s'en retourner ; que vous y suivrez a la fete de saint Michel ; que vous y recevrez la loi des chretiens ; que vous deviendrez son vassal en tout honneur et tout bien. Veut-il des otages, or bien, envoyez-en, ou dix ou vingt, pour le mettre en confiance. Envoyons-y les fils de nos femmes : dut-il perir, j'y enverrai le mien. Bien mieux vaut qu'ils y perdent leurs tetes et que nous ne perdions pas, nous, franchise et seigneurie, et ne soyons pas conduits a mendier. »

IV

BLANCANDRIN dit. « Par cette mienne dextre, et par la barbe qui flotte au vent sur ma poitrine, sur l'heure vous verrez l'armee des Francais se defaire. Les Francs s'en iront en France : c'est leur pays. Quand ils seront rentres chacun dans son plus cher domaine, et Charles dans Aix, sa chapelle, il tiendra, a la Saint-Michel, une tres haute cour. La fete viendra, le terme passera : le roi n'entendra de nous sonner mot ni nouvelle. Il est orgueilleux et son c?ur est

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