Prolongent, dans les nids sourds,

La ravissante querelle

Des baisers et des amours.

Sous les treilles de la plaine,

Dans l’antre ou verdit l’osier,

Virgile enivre Silene,

Et Rabelais Grandgousier.

O Virgile, verse a boire!

Verse a boire, o Rabelais!

La foret est une gloire;

La caverne est un palais!

Il n’est pas de lac ni d’ile

Qui ne nous prenne au gluau,

Qui n’improvise une idylle,

Ou qui ne chante un duo.

Car l’amour chasse aux bocages,

Et l’amour peche aux ruisseaux,

Car les belles sont les cages

Dont nos c?urs sont les oiseaux.

De la source, sa cuvette,

La fleur, faisant son miroir,

Dit: «Bonjour», a la fauvette,

Et dit au hibou: «Bonsoir.»

Le toit espere la gerbe,

Pain d’abord et chaume apres;

La croupe du b?uf dans l’herbe

Semble un mont dans les forets.

L’etang rit a la macreuse,

Le pre rit au loriot,

Pendant que l’orniere creuse

Gronde le lourd chariot.

L’or fleurit en giroflee;

L’ancien zephyr fabuleux

Souffle avec sa joue enflee

Au fond des nuages bleus.

Jersey, sur l’onde docile,

Se drape d’un beau ciel pur,

Et prend des airs de Sicile

Dans un grand haillon d’azur.

Partout l’eglogue est ecrite;

Meme en la froide Albion,

L’air est plein de Theocrite,

Le vent sait par c?ur Bion;

Et redit, melancolique,

La chanson que fredonna

Moschus, grillon bucolique

De la cheminee Etna.

L’hiver tousse, vieux phthisique,

Et s’en va; la brume fond;

Les vagues font la musique

Des vers que les arbres font.

Toute la nature sombre

Verse un mysterieux jour;

L’ame qui reve a plus d’ombre

Et la fleur a plus d’amour.

L’herbe eclate en paquerettes;

Les parfums, qu’on croit muets,

Content les peines secretes

Des liserons aux bleuets.

Les petites ailes blanches

Sur les eaux et les sillons

S’abattent en avalanches;

Il neige des papillons.

Et sur la mer, qui reflete

L’aube au sourire d’email,

La bruyere violette

Met au vieux mont un camail;

Afin qu’il puisse, a l’abime

Qu’il contient et qu’il benit,

Dire sa messe sublime

Sous sa mitre de granit.

Granville, juin 1836.

XV. La coccinelle

Elle me dit: «Quelque chose

Me tourmente.» Et j’apercus

Son cou de neige, et, dessus,

Un petit insecte rose.

J’aurais du – mais, sage ou fou,

A seize ans, on est farouche, -

Voir le baiser sur sa bouche

Plus que l’insecte a son cou.

On eut dit un coquillage;

Dos rose et tache de noir.

Les fauvettes pour nous voir

Se penchaient dans le feuillage.

Sa bouche fraiche etait la:

Je me courbai sur la belle,

Et je pris la coccinelle;

Mais le baiser s’envola.

«Fils, apprends comme on me nomme»,

Dit l’insecte du ciel bleu,

«Les betes sont au bon Dieu;

Mais la betise est a l’homme.»

Paris, mai 1830.

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