Et que, si haut qu’il faut qu’on monte,

J’y monterai!

Vous savez bien que l’ame est forte

Et ne craint rien

Quand le souffle de Dieu l’emporte!

Vous savez bien

Que j’irai jusqu’aux bleus pilastres,

Et que mon pas,

Sur l’echelle qui monte aux astres,

Ne tremble pas!

L’homme, en cette epoque agitee,

Sombre ocean,

Doit faire comme Promethee

Et comme Adam.

Il doit ravir au ciel austere

L’eternel feu;

Conquerir son propre mystere,

Et voler Dieu.

L’homme a besoin, dans sa chaumiere,

Des vents battu,

D’une loi qui soit sa lumiere

Et sa vertu.

Toujours ignorance et misere!

L’homme en vain fuit,

Le sort le tient; toujours la serre!

Toujours la nuit!

Il faut que le peuple s’arrache

Au dur decret,

Et qu’enfin ce grand martyr sache

Le grand secret!

Deja l’amour, dans l’ere obscure

Qui va finir,

Dessine la vague figure

De l’avenir.

Les lois de nos destins sur terre,

Dieu les ecrit;

Et, si ces lois sont le mystere,

Je suis l’esprit.

Je suis celui que rien n’arrete,

Celui qui va,

Celui dont l’ame est toujours prete

A Jehovah;

Je suis le poete farouche,

L’homme devoir,

Le souffle des douleurs, la bouche

Du clairon noir;

Le reveur qui sur ses registres

Met les vivants,

Qui mele des strophes sinistres

Aux quatre vents;

Le songeur aile, l’apre athlete

Au bras nerveux,

Et je trainerais la comete

Par les cheveux.

Donc, les lois de notre probleme,

Je les aurai;

J’irai vers elles, penseur bleme,

Mage effare!

Pourquoi cacher ces lois profondes?

Rien n’est mure.

Dans vos flammes et dans vos ondes

Je passerai;

J’irai lire la grande bible;

J’entrerai nu

Jusqu’au tabernacle terrible

De l’inconnu,

Jusqu’au seuil de l’ombre et du vide,

Gouffres ouverts

Que garde la meute livide

Des noirs eclairs,

Jusqu’aux portes visionnaires

Du ciel sacre;

Et, si vous aboyez, tonnerres,

Je rugirai.

Au dolmen de Rozel, janvier 1853.

III .

Un spectre m’attendait dans un grand angle d’ombre,

Et m’a dit:

– Le muet habite dans le sombre.

L’infini reve, avec un visage irrite.

L’homme parle et dispute avec l’obscurite,

Et la larme de l’?il rit du bruit de la bouche.

Tout ce qui vous emporte est rapide et farouche.

Sais-tu pourquoi tu vis? sais-tu pourquoi tu meurs?

Les vivants orageux passent dans les rumeurs,

Chiffres tumultueux, flots de l’ocean Nombre.

Vous n’avez rien a vous qu’un souffle dans de l’ombre;

L’homme est a peine ne, qu’il est deja passe,

Et c’est avoir fini que d’avoir commence.

Derriere le mur blanc, parmi les herbes vertes,

La fosse obscure attend l’homme, levres ouvertes.

La mort est le baiser de la bouche tombeau.

Tache de faire un peu de bien, coupe un lambeau

D’une bonne action dans cette nuit qui gronde;

Ce sera ton linceul dans la terre profonde.

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