Dans les cavernes etonnees,

Les perles, d’etre devinees,

Et les mondes d’etre trouves!

Dans l’ombre immense du Caucase,

Depuis des siecles, en revant,

Conduit par les hommes d’extase,

Le genre humain marche en avant;

Il marche sur la terre; il passe,

Il va, dans la nuit, dans l’espace,

Dans l’infini, dans le borne,

Dans l’azur, dans l’onde irritee,

A la lueur de Promethee,

Le liberateur enchaine!

XI

Oh! vous etes les seuls pontifes,

Penseurs, lutteurs des grands espoirs,

Dompteurs des fauves hippogriffes,

Cavaliers des pegases noirs!

Ames devant Dieu toutes nues,

Voyants des choses inconnues,

Vous savez la religion!

Quand votre esprit veut fuir dans l’ombre,

La nuee aux croupes sans nombre

Lui dit: Me voici, Legion!

Et, quand vous sortez du probleme,

Celebrateurs, revelateurs!

Quand, rentrant dans la foule bleme,

Vous redescendez des hauteurs,

Hommes que le jour divin gagne,

Ayant mele sur la montagne

Ou montent vos chants et nos v?ux,

Votre front au front de l’aurore,

O geants! vous avez encore

De ses rayons dans les cheveux!

Allez tous a la decouverte!

Entrez au nuage grondant!

Et rapportez a l’herbe verte,

Et rapportez au sable ardent,

Rapportez, quel que soit l’abime,

A l’Enfer, que Satan opprime,

Au Tartare, ou saigne Ixion,

Aux c?urs bons, a l’ame mechante,

A tout ce qui rit, mord ou chante,

La grande benediction!

Oh! tous a la fois, aigles, ames,

Esprits, oiseaux, essors, raisons,

Pour prendre en vos serres les flammes,

Pour connaitre les horizons,

A travers l’ombre et les tempetes,

Ayant au-dessus de vos tetes

Mondes et soleils, au-dessous

Inde, Egypte, Grece et Judee,

De la montagne et de l’idee,

Envolez-vous! envolez-vous!

N’est-ce pas que c’est ineffable

De se sentir immensite,

D’eclairer ce qu’on croyait fable

A ce qu’on trouve verite,

De voir le fond du grand cratere,

De sentir en soi du mystere

Entrer tout le frisson obscur,

D’aller aux astres, etincelle,

Et de se dire: Je suis l’aile!

Et de se dire: J’ai l’azur!

Allez, pretres! allez, genies!

Cherchez la note humaine, allez,

Dans les supremes symphonies

Des grands abimes etoiles!

En attendant l’heure doree,

L’extase de la mort sacree,

Loin de nous, troupeaux soucieux,

Loin des lois que nous etablimes,

Allez gouter, vivants sublimes,

L’evanouissement des cieux!

Janvier 1856.

XXIV. En frappant a une porte

J’ai perdu mon pere et ma mere,

Mon premier ne, bien jeune, helas!

Et pour moi la nature entiere

Sonne le glas.

Je dormais entre mes deux freres;

Enfants, nous etions trois oiseaux;

Helas! le sort change en deux bieres

Leurs deux berceaux.

Je t’ai perdue, o fille chere,

Toi qui remplis, o mon orgueil,

Tout mon destin de la lumiere

De ton cercueil!

J’ai su monter, j’ai su descendre.

J’ai vu l’aube et l’ombre en mes cieux.

J’ai connu la pourpre, et la cendre

Qui me va mieux.

J’ai connu les ardeurs profondes,

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